Cimetière habité de Navotas

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Enterrement d'une grand-mère dans le cimetière municipal de Navotas à Manille, aux Philippines - Christophe MOEC

"Cimetière habité de Navotas" en argentique noir et blanc

Série réalisée dans le cimetière public de la ville de Navotas située dans la partie nord de la métropole de Manille, aux Philippines.

L’île de Luçon est la quatrième île la plus peuplée du monde et Manille figure parmi les villes les plus denses du globe avec près de 15 millions d’habitants et environ 22 millions pour le Grand Manille (The Metro Manila). On estime à 3 millions le nombre de sans-abri dans la capitale et un tiers sont des enfants.

Dans un contexte de forte croissance démographique, les cimetières sont devenus progressivement des zones de refuge pour de nombreuses personnes. Le cimetière de Navotas a vu ses premiers résidents s’installer à partir du milieu des années 80 au moment de la crise économique qui a provoqué un important exode rural. Le phénomène s’est accentué avec les réfugiés climatiques, mais aussi avec la gentrification urbaine et la fermeture de certains bidonvilles situés en centre-ville. Ce nouveau secteur a été rebaptisé « Bagong Silang » (« nouveau-né » en dialecte Tagalog).

Trente ans plus tard, ce sont près de 6000 hommes, femmes et enfants qui vivent dans le cimetière de Navotas, dans les caveaux au milieu des sépultures ou bien en lisière dans un camp de fortune. Ces milliers de personnes vivent de la récupération, de la maintenance des tombes, de la pêche et de petits boulots y compris le trafic de drogue. L’absence d’infrastructures engendre des problèmes sanitaires et de pollution. La plage en lisière du cimetière ressemble à une décharge, elle est recouverte d’une épaisse masse de déchets qui s’accumulent au fil des ouragans.

Au cimetière de Navotas les tombes des gens défavorisés sont formées de simples boîtes en béton (avec ou sans cercueil) empilées les unes sur les autres sur plusieurs mètres de hauteurs et allouées pour 5 ans. Passé ce délai, les ossements sont mis dans un sac en plastique à destination de la famille, et si le sac n’est pas récupéré ils sont alors incinérés. Les frais funéraires épuisent souvent les ressources d’une famille indigente qui est souvent contrainte d’emprunter de l’argent pour organiser des funérailles décentes.

Depuis 2014, les autorités ont annoncé un plan de relocalisation des squatteurs, mais les efforts de dépeuplement de Bagong Silang ne sont pas en corrélation avec les forts taux de croissance économique des Philippines ces dernières années, avec plus de 5% par an (excepté en 2020 année de l’épidémie de Covid-19). De leur côté, les résidents se battent pour rester sur place le plus longtemps possible car ils craignent de partir pour une solution encore plus précaire.

Légendes photo

Photo 1 : Un habitant du cimetière a capturé un pigeon domestique, son futur repas.

Photo 2 : Deux enfants du cimetière jouent sur un tricycle à moteur devant un empilement de tombes.

Photo 3 : Un couple dans le campement de fortune de Bagong Silang où vivent des milliers de familles.

Photo 4 : Homme impécunieux qui vit dans une petite tente de fortune sur sur la digue en béton en lisière du cimetière.

Photo 5 : Enfants endormis au milieu d’une sépulture sur un matelas dans le cimetière municipal situé au nord de Manille.

Photo 6 : Une maman et son fils dans le caveau du cimetière de Navotas où ils ont élu domicile.

Photo 7 : Une pierre tombale sert d’étendoir pour les vêtements des habitants du cimetière de Navotas.

Photo 8 : Passage d’un corbillard dans le cimetière municipal de Navotas. Le cercueil indique qu’il s’agit d’un enterrement d’un certain statut.

Photo 9 : Derniers adieux à la défunte avant fermeture du cercueil.

Photo 10 : Un fossoyeur referme une sépulture à l’aide de briques et de ciment, sous le regard attentif des proches.

Photo 11 : Enterrement d’une grand-mère au cimetière public de Navotas, sur un ballon on peut lire « RIP Nanay Erna« .

Photo 12 : Un fossoyeur referme une sépulture à l’aide de briques et de ciment, sous le regard attentif des proches.

Photo 13 : Un résident du cimetière repeint une sépulture contre un peu d’argent.

Photo 14 : Un homme se recueille sur la tombe de sa maman.

Photo 15 : Un sac d’ossements d’un ou d’une défunt.e a été déposé devant une sépulture. Passé le délai de 5 ans, la dépouille reste à la disposition des proches. Sans aucune nouvelles, la dépouille sera incinérée.

Photo 16 : Des hommes jouent sur un petit terrain de baskets aménagé dans le cimetière par les résidents.

Photo 17 : Un jeune habitant du cimetière de Navotas s’amuse dans l’eau de la Baie de Manille avec une perruque de récupération sur la tête.