Mémoires de Cantagalo-Pavao-Pavaozinho

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Mystérieuse jeune fille dans l'embrasure de la porte de sa maison dans la favela Pavão-Pavãozinho à Rio de Janeiro - Christophe MOEC

"Mémoires de Cantagalo-Pavao-Pavaozinho" en argentique couleur

Série issue d’un reportage sur les habitants de deux favelas mitoyennes « Cantagalo » et « Pavão-Pavãozinho » de la zone sud de Rio de Janeiro. Cette communauté compte près de 11.000 habitants répartis sur deux collines Cantagalo et Pavão-Pavãozinho, sur un territoire relativement restreint ce qui en fait une des favelas les plus densément peuplée de la ville.

Le terme « favela » désigne un type d’habitation populaire au Brésil qui s’apparente au bidonville avec des constructions à l’origine sur des terrains illégaux et des matériaux de récupération. Rio de Janeiro comptabilise à elle seule près de 1000 favelas. Cantagalo a été occupée au début du XXe siècle, principalement par d’anciens esclaves et immigrants venus des campagnes. Pavão-Pavãozinho a émergé au cours des années 1930, principalement par des immigrants du nord et de la partie la plus pauvre du Brésil.

À partir du milieu des années 1990, la mairie de Rio a entamé un processus pour « légaliser » progressivement cet espace marginal regroupant une frange de la population pauvre pour qui l’accès au logement demeure impossible (la majorité survit avec moins que le salaire minimum par habitant). Ce programme d’urbanisation qui vise à intégrer les favelas au reste de la ville s’appelle « Favela-Bairro ». Mais l’enjeu est si complexe, tant du point de vue juridique, social et économique, que l’objectif d’inclusion reste loin d’être satisfaisant 30 ans après son lancement. Les habitants des favelas se plaignent en effet souvent du manque d’infrastructures et de services, mais aussi de problèmes d’insécurité, si bien que ces territoires se situent toujours entre légalité et illégalité aujourd’hui.

Cantagalo-Pavao-Pavaozinho a bénéficié de certaines avancées significatives au fil du temps comme la gestion des ordures, l’éclairage public, le drainage des eaux usées, le revêtement des sols et la construction de deux élévateurs pour faciliter l’accès sur les hauteurs de chaque communauté. Néanmoins, beaucoup reste à faire, notamment en matière d’éducation et de sécurité, or les politiques semblent avoir moins de velléités pour ces territoires depuis la fin des Jeux olympiques d’été de 2016 à Rio.

Ainsi, les inégalités sociales perdurent et un fossé réel subsiste avec le reste de la ville. Or, le contraste est d’autant plus frappant que ces deux favelas jouissent d’une position géographique particulière puisqu’elles se situent sur deux collines à moins d’un kilomètre chacune des célèbres plages de Copacabana et d’Ipanema. Les habitants de Cantagalo-Pavao-Pavaozinho sont d’ailleurs très fiers de vivre au cœur d’un paysage exceptionnel et de jouir d’un point de vue meilleur que celui des hôtels de luxe aux alentours.

Cependant, les cariocas qui vivent tout près de ces deux favelas ne s’y aventurent guère car ils les jugent trop dangereuses et trop insalubres. Un simulacre de police est présent sur la voie d’accès unique par la route pour rassurer les citoyens et leur faire croire que la zone est pacifiée, autrement dit sous contrôle de la municipalité, mais la police ne s’aventure presque jamais à l’intérieur (sauf cas exceptionnel avec des forces spéciales et un hélicoptère pour guider les opérations).

Deux « mondes » vivent ainsi en parallèle, deux univers qui se côtoient pourtant par la force des choses car les personnes actives des favelas travaillent dans les restaurants, les hôtels, les commerces, les hôpitaux, les marchés, ou comme livreurs, plagistes, etc. La plage joue d’ailleurs un rôle primordial à Rio de Janeiro en tant que vecteur de mixité sociale, elle gomme en effet les inégalités ponctuellement et permet une réelle cohésion de toute la population. Cette opposition, à la fois géographique et sociologique, m’a poussée à réaliser ce reportage sur ces habitants et ce lieu hors du commun.

En 2014, Libération a publié une des photos issues de ce reportage à la Une de son Journal avant la coupe du monde de football de Rio le 12 juin. Peu de temps avant, le 22 avril 2014, Douglas Rafael da Silva Pereira, un danseur et DJ de Pavão-Pavãozinho âgé de 25 ans, a été abattu par erreur par la police. Une rébellion farouche de toute la communauté a suivi immédiatement contre l’unité de police de pacification alors en place à cette époque (UPP pour « Unidade de Polícia Pacificadora »). Le gouvernement brésilien a dû faire appel à l’armée pour mettre fin aux émeutes sanglantes devant les caméras du monde entier. Je vivais à Cantagalo à cette époque et j’ai donc vécu les événements de l’intérieur avec stupéfaction.

Plus récemment, en mai 2023, une galerie à Ipanema située tout près de ces deux favelas a exposé mes photos issue de cette série sous ce même titre « Memórias de Cantagalo-Pavão-Pavãozinho ».

Découvrez ce photoreportage au format 120 monochrome.

Légendes photo

Photo 1 : Homme assis sur un tapis dans la favela Cantagalo.

Photo 2 : Favela de Cantagalo avec quelques arbres très rares.

Photo 3 : Une femme et son fils devant leur maison sur les hauteurs de la favela Pavão-Pavãozinho.

Photo 4 : Homme de dos dans la favela Pavão-Pavãozinho avec le maillot de l’équipe de foot du Brésil et une cage à oiseaux.

Photo 5 : Enfant avec un ballon de foot dans la favela Cantagalo.

Photo 6 : Visage d’une fillette sur les hauteurs de la favela Pavão-Pavãozinho.

Photo 7 : Joueur de cavaquinho (petite guitare brésilienne), dans la favela Cantagalo-Pavao-Pavaozinho.

Photo 8 : Un père et son fils « Kaike » sur le toit de leur maison à Cantagalo.

Photo 9 : Une fillette escalade les parois du couloir de sa maison dans la favela Pavao-Pavaozinho.

Photo 10 : Deux enfants jouent sur un fauteuil dans la favela Cantagalo.

Photo 11 : Un homme à la retraite regarde par la porte de son logement dans la favela Pavao-Pavaozinho.

Photo 12 : Un homme fait de la musculation avec des haltères en béton dans la favela Cantagalo.

Photo 13 : Un homme à son domicile à Cantagalo, il travaille comme plagiste sur Ipanema.

Photo 14 : Un enfant joue avec une boîte à chaussures dans la favela Cantagalo.

Photo 15 : Un homme torse nu descend des escaliers dans la favela Pavão-Pavãozinho.

Photo 16 : Un homme âgé fume une cigarette roulée dans la favela Cantagalo.

Photo 17 : Un enfant joue au cerf-volant perché sur un mur de Cantagalo. Au loin, on aperçoit la Colline des Deux Frères (Morro Dois Irmãos) où se situe la favela Vidigal.

Photo 18 : Un homme, ancien percussionniste, écoute de la bossa nova devant sa maison dans la favela Cantagalo.

Photo 19 : Une femme prépare à manger pour sa famille dans sa cuisine de la favela Cantagalo.

Photo 20 : Une mère et son fils dans la favela Cantagalo, la femme tient un gobelet de bière Itaipava.

Photo 21 : Une fillette se prélasse dans une baignoire posée à l’extérieur sur les hauteurs de la favela Pavão-Pavãozinho.

Photo 22 : Des enfants jouent dans la favela Cantagalo, deux d’entre eux tiennent une tétine dans la bouche.

Photo 23 : Une fillette se tient à l’ombre dans la favela Cantagalo.

Photo 24 : Un homme atteint de la gangrène regarde à l’extérieur de chez lui par la porte ouverte.

Photo 25 : Deux petites filles jouent sur un banc peint aux couleurs rasta dans la favela Pavão-Pavãozinho.

Photo 26 : Un vieil homme allongé sur son lit dans sa chambre à Cantagalo.

Photo 27 : Un enfant joue avec une guitare dans la favela Cantagalo. En arrière-plan on aperçoit la favela Pavão-Pavãozinho.

Photo 28 : Un surfeur descend une allée de la favela Pavão-Pavãozinho en direction de la plage d’Ipanema.

Photo 29 : Une vieille femme fait la sieste sur son canapé dans la favela Pavão-Pavãozinho.

Photo 30 : Un homme se fait tailler la barbe dans la favela Cantagalo.

Photo 31 : Une femme regarde par la fenêtre d’une maison en construction dans la favela Pavão-Pavãozinho.

Photo 32 : Un homme porte un chapeau de fête en plastique rose dans la favela Pavao-Pavaozinho.

Photo 33 : Deux femmes à travers une fenêtre de la favela Cantagalo. L’une d’entre elle tient une tête de mannequin.

Photo 34 : Un homme complice avec son coq perché sur son épaule dans favela Pavao-Pavaozinho.

Photo 35 : Un homme vêtu d’une casquette rasta dans une ruelle de la favela Cantagalo.

Photo 36 : Un homme en train de prier dans une église de la favela Cantagalo.

Photo 37 : Une fillette se cache le visage derrière un ballon peint avec un sourire dans la favela Cantagalo.

Photo 38 : Un homme vêtu d’un chapeau Panama et d’une chemise à carreaux dans la favela Pavao-Pavaozinho.

Photo 39 : Deux hommes transportent des matériaux de construction dans la favela Cantagalo.

Photo 40 : Une femme lave son chien avec un grand soin dans une allée de la favela Cantagalo.

Photo 41 : Un petit garçon joue avec un pot à bulles devant chez lui dans la favela Cantagalo.

Photo 42 : Un maçon se tient entre deux murs extérieur de deux maisons très proches dans la favela Cantagalo.

Photo 43 : Préparation de la coxinha dans la favela Cantagalo, un aliment typique du Brésil à base de pâte de farine de blé.

Photo 44 : Une fillette dans l’embrasure de la porte de sa maison dans la favela Pavao-Pavaozinho.

Photo 45 : Une femme âgée assise vue à travers une marche manquante d’un escalier en béton de la favela Pavao-Pavaozinho.

Photo 46 : Vue panoramique de la plage de Copacabana depuis la favela Pavao-Pavaozinho.